Il y a là une question grave, fondamentale tant pour le bien de nos enfants que quant à l’avenir du christianisme dans notre pays, et donc de sa structuration culturelle et civilisationnelle.
Une question grave mais pas facile : très nombreux sont les parents et les grands-parents qui me partagent leur profonde tristesse que la foi n’ait pas été reçue par leurs enfants. Et beaucoup de se sentir démunis, ou bien de culpabiliser, ou au contraire de se faire procureurs d’autres ou de l’Eglise qui seraient responsables de cette non-transmission. J’en suis le témoin, presque chaque semaine, dans la célébration des funérailles : le modèle le plus récurent est celui d’une personne âgée ayant « lâché » la pratique sacramentelle fervente dans sa jeunesse, dont les enfants ont été certes baptisés et un peu catéchisés mais ne se sont personnellement plus vraiment engagés, et dont les petits-enfants sont (presque) totalement ignorants du christianisme. Parfois, ils essaient de masquer leur désappointement en soulignant l’importance des « valeurs », confondant ainsi la foi en un Dieu qui sauve et une morale séculière.
Face à cette question, le quotidien La Croix a publié dans son édition du 5 avril un article très intéressant - qui reprend en fait largement le travail déjà connu et reconnu du sociologue Yann Raison du Cleuziou – pour donner des clés de compréhension. Ces clés ne sont ni absolues ni définitives, car, comme l’écrit la journaliste, « même pour les familles qui ont placé la foi au cœur de leur vie familiale, la transmission reste souvent une énigme », signe de la souveraineté de Dieu dans le don de sa grâce et de la liberté de l’homme dans sa réception.
Certainement les facteurs explicatifs de cette moindre transmission de la foi dans les familles catholiques que dans les autres religions sont nombreux et l’espace d’un édito ne suffit pas à leur faire tous droit, mais je crois que le travail sociologique de Yann Raison met clairement en lumière le rôle irremplaçable des parents dans la transmission de la foi à leurs enfants en la vivant eux-mêmes avec ferveur pour en signifier la crédibilité. Et je consonne ici particulièrement avec les deux universitaires sur le caractère central et irremplaçable de la pratique dominicale et sur la prise de recul et la liberté quant à « l’esprit du monde ».
Je vois dans leurs propos un encouragement pour tous les parents qui se donnent du mal pour vivre cet engagement pris au jour de leur mariage de transmettre la foi à leurs enfants, et cela me donne l’occasion de leur dire et redire le profond désir que j’ai que la paroisse les soutienne autant qu’elle le peut dans cette mission. J’y vois aussi un support et une occasion de dialogue et d’échange avec tous ceux que nous connaissons et qui, sans mauvais esprit, ne prennent cependant pas les moyens de transmettre eux-mêmes par leur vie et leur engagement la foi à leurs enfants : comme le dit l’article, il ne faut pas se voiler la face ou avoir une espérance magique : dans 98% des cas la foi ne sera pas transmise. Et alors il ne faut pas être grand clerc pour discerner qu’à la place se développeront soit des vies vides et marquées par le nihilisme, soit diverses autres formes de religiosité : essentiellement l’islam, le paganisme, l’ésotérisme, le panthéisme et les sectes.
Nous vous donnons un large résumé de cet article que je vous invite néanmoins à lire dans son intégralité, ainsi que les deux témoignages complémentaires, soit sur le site de La Croix, soit dans le numéro du 5 avril. Vous pouvez lire aussi les travaux de Yann Raison du Cleuziou, qui sont très éclairants sur ce sujet, en particulier Qui sont les cathos aujourd’hui ? , DDB, 2014.