C’est aussi un défi, parce que chacun comprend bien que ceux qui étaient là avant ne peuvent pas continuer à vivre comme si rien ne s’était passé avec l’arrivée de ces nouveaux chrétiens.
L’enjeu, d’abord, est celui de l’accueil, et il n’est pas négligeable. Une expérience assez signifiante peut illustrer cela : lors de certaines étapes de préparation au baptême, j’ai invité les cathéchumènes, à l’issue de la Messe paroissiale, à se joindre à moi pour la procession de sortie. Juste avant, lors des annonces, j’avais invité les paroissiens à leur manifester leur bienveillance et leur fraternité à la sortie de la Messe. Résultat : selon les Messes, entre 75 et 90% (!) des paroissiens sont sortis sans même leur adresser un simple « bonjour » ou un sourire. Ils les ont tout simplement et parfaitement ignorés. Nos catéchumènes n’auraient pas été là, c’était exactement pareil. Evidement, d’autres paroissiens, une petite minorité, a su leur exprimer avec chaleur leur enthousiasme, certains même de les inviter à déjeuner ! Mais, pour la grande majorité, quel long chemin demeure-t-il à parcourir pour prendre conscience du fait que si nous souhaitons réellement former le corps mystique du Christ (ce qui est tout de même sa volonté !), nous avons à réellement irriguer par notre charité fraternelle les membres agrégés (nouveaux venus ou baptisés), et que nous ne pouvons pas nous contenter de les ignorer aimablement… L’Eglise n’est pas un club d’amis ou un agrégat d’individus solitaires, et une paroisse ne peut pas l’être non plus. Ou alors cette paroisse n’est tout simplement pas chrétienne.
Accueillir les néophytes, accueillir les nouveaux, donc, est fondamental. Mais il me semble que c’est en fait encore largement insuffisant : plutôt que de simplement laisser une petite place à l’autre, sans trop se déranger, il nous faudrait plus radicalement nous mettre à l’école de nos néophytes. Après tout, encore suintant la bonne odeur du Saint-Chrême, régénérés par la grâce du baptême, ils sont les plus saints d’entre nous. Leur fraicheur et leur enthousiasme doivent faire école pour les « vieux » chrétiens, trop souvent blasés, tiédis, quand ils ne pèchent pas carrément par acédie…
En fait, il me semble que la juste attitude serait que chacun personnellement, et notre paroisse collectivement, demeure en état permanent de catéchuménat et de néophytat. Tous les fidèles devraient, en vertu de leur vocation baptismale foncièrement missionnaire, pouvoir être accompagnateurs de catéchumènes, catéchistes, éducateurs à la foi, annonceurs de la Bonne Nouvelle. Voilà ce qui pourrait constituer une boussole pour nous guider et nous encourager à être tous des disciples-missionnaires, et cela de toutes sortes de manières. Les catéchumènes doivent ainsi être reçus comme un don de Dieu particulièrement stimulant. Prions donc, sans relâche, et interpellons, que le Seigneur touche les cœurs, pour la joie du monde.
Curé de Chaville